lundi 26 mai 2014

Une démission totale des politiques

La très prévisible déroute subie hier par les partis politiques "républicains" à travers l'Europe invite à s'interroger sur les voies possibles pour sortir de l'abîme dans laquelle est plongé le continent depuis trop longtemps. Le groupe qui devrait être formé dans les prochains jours au parlement continental par les partis europhobes signe une Berezina majeure et malheureusement durable au sein d'une instance essentielle de gouvernance pour plus de 500 millions de citoyens. La surprise feinte par les dirigeants de l'UMP et du PS n'est aucunement crédible : leurs comportements sont la principale raison de leur discrédit. Aujourd'hui, bien au delà des discours, c'est une refondation de la vie politique française qui est nécessaire pour sortir de cette montée continue de l'abstention et du rejet. Cette démarche passe par trois étapes : un diagnostic des attentes, une approche pragmatique des solutions et un désintéressement imposé aux cadres des forces en présence.  
1) Le diagnostic. L'ensemble des partis de gouvernement jumelés à ceux de l'opposition doivent impérativement comprendre les raisons du rejet vécu hier. Incapable de faire remonter les ressentis des élus locaux au sein de structures pyramidales, l'ensemble des partis doivent lancer un grand sondage sur les souhaits, les priorités et les solutions proposés par les Français.  
2) L'approche pragmatique. Le sursaut républicain appelé de ses souhaits par le premier ministre doit être suivi d'action sur les bases du diagnostic réalisé. Des réformes importantes doivent être entreprises conjointement par l'ensemble de la classe politique française. Les propositions de lois devront être réalisés par des économistes, des spécialistes de la force publique et rédigées par des groupes non-partisans.  
3) Désintéressement imposé. Il est terriblement révélateur d'avoir assisté hier aux commentaires de Jean-François Copé, Laurent Fabius, François Bayrou et autres... Leur approche clientéliste, leur mutisme pour toute proposition crédible et leur obsession de la présidentielle les éloignent de tout intérêt pour les basses choses que sont... la vie des gens qu'ils gouvernent. Pour assurer une gestion pragmatique de la situation actuelle, il faudrait un engagement de la part des hommes politiques à se retirer une fois leur mission accomplie.

mardi 6 décembre 2011

5ème économie mondiale cherche commerciaux



S'agit-il d'une révélation, d'un mea-culpa ou d'un élan de pragmatisme en ces jours délicats ? Toujours est-il qu'à quelques jours près, Les Enjeux et le Monde ont souligné le déficit français en terme de d'expertise commerciale.
Le supplément des Échos ouvrait le bal, vendredi, en employant des termes peu ambigus : "ses [honteuses] limites", "[un État] bien piètre commerçant". Le quotidien du soir reprenait, mardi, le qualificatif ("piètres commerciaux") et complétait le tableau en soulignant l'importance des négligées "relations commerciales" qui engendraient une incompatibilité entre l'offre hexagonale et les attentes des clients.
Les échecs commerciaux sur les appels d'offres internationaux ne sont que la face émergée de l'iceberg : à l'inverse de leurs voisines germaniques, les PME et PMI françaises exportent peu.
La question qu'ouvrent ces articles et chiffres est limpide : quelle est l'origine de ce mal français ? Une réponse simple mais très crédible est celle d'une réticence culturelle pour les fonctions commerciales. Ainsi même les présentations ventant les formations en école de... commerce ne mentionnent que des débouchées dans des postes en finance, en marketing, en l'audit, en publicité et en communication. Le "commerce" y est adossé à l'adjectif "international" pour faire passer la pilule.
Représenté comme un beauf absolu, en chemisette, étui de portable à la ceinture et poignet chargé de gourmettes, le commercial est à la comédie actuelle (Caméra Café) ce que le médecin était à la scène de Molière.
Loin d'être une exception française (on trouve le même dénigrement aux États-Unis), il est ici amplifié au point d'entrainer un rejet radical de ces fonctions que ne compense pas un niveau de rémunération souvent conséquent.
Il est enfin indéniable que le désintérêt des français pour l'argent joue dans ce mépris : le commercial étant, par contrat, "intéressé".
Heureusement, les choses changent. Dans un sujet sur la relève des dirigeants des grandes entreprises également tiré des Enjeux, une chasseuse de tête insiste sur le fait que les diplômés promis aux plus hautes fonctions doivent désormais justifier "une expérience commerciale (réussie)".
Une nouvelle révision des stéréotype français pourrait nous permettre de mettre fin à une autre réalité énoncée aujourd'hui par Libération : le salaire moyen annuel est de 20 257 € net en France... et de 24 098 € net outre-Rhin.

lundi 16 août 2010

Brice d’Auvergne


La meilleure défense, c’est l’attaque. Depuis quelques semaines, le gouvernement semble avoir adopté cette stratégie. Après avoir exilé Eric Woerth à Chamonix pour ne plus laisser cette plaie béante à la portée des offensives (timides) de l’opposition et (beaucoup plus agressives) des médias, l’équipe Sarkozy est repartie à l’attaque.
Si le président a balisé la voie lors de son allocution grenobloise, c’est Brice Hortefeux qui, galvanisé, embraye de façon incontrôlable.
Sans même revenir sur sa récente condamnation pour injure raciale, il est très gênant d’entendre un ministre prendre position de façon précipitée et violente sur des sujets fondamentaux.
« Lorsque j’entends des responsables politiques défendre la dépénalisation du cannabis et l’implantation des salles de shoot, je me demande : jusqu’où ira-t-on dans l’irresponsabilité ? » s’interrogeait le ministre au début du mois de juillet. La question des « salles de shoot » n’a rien d’évident. Les points positifs observés des les pays où ces salles ont été expérimentées (suivi des usagés, hygiène des injections, chute de la mortalité…) doivent être mis en rapport avec problèmes qui y ont émergé (augmentation de la consommation, risque d’initiation, présence de dealers à proximité des centres…) avant toute prise de décision. Décréter de façon préventive que débattre de l’opportunité d’une telle politique relève de l’ « irresponsabilité » montre une fermeture d’esprit et un empirisme peu appropriés à la fonction de ministre de l'intérieur dont l'une des missions est de « Protéger la population contre les risques ou fléaux de toute nature ».
Dans un autre registre, le ministre n’hésite pas à qualifier de « présumé coupable » un mis en examens. Faute de langage ? Interrogé sur ses propos, il persiste : « Mon opinion est faite ».
Brice Hortefeux caractérise, ainsi, la fuite en avant d'une équipe gouvernementale qui exhibe des certitudes basées sur des idéologies contestables en tentant d'en faire un nouveau socle identitaire pour des électeurs désemparés.

mardi 4 mai 2010

Du cas hellène à l’harmonisation européenne.


La crise traversée par la zone Euro peut être maîtrisée et ses enseignements orienter de nouvelles règles communes pour ses pays membres.

1) Dompter - sans enrager - Athéniens (… et Romains).

Angela Merkel, après s’être fantasmée en maîtresse de l’orthodoxie financière européenne, a fini par se résoudre à ne pas jouer les sorcières face à la marmite systémique. Les 110 Milliards d'Euro apportés par l’Europe et le FMI représentent une somme largement supérieure à celle qu’il aurait été nécessaire de débloquer, il y a encore quelques semaines, pour calmer les craintes des prêteurs (et l’appétit des spéculateurs). On est cependant très loin de l’addition qu’aurait représenté un TEERP (pour Troubled European Economy Relief Program pendant du TARP mis en place par le trésor américain pour couvrir les banques étasuniennes suite à la faillite de Lehman Brothers).
Il est désormais impératif de maintenir l’épicentre grec sous observation sans pour autant faire preuve d’un zèle excessif qui provoquerait le renversement du volontaire gouvernement hellène.
Il est également important de tenir l’Italie à distance de la moindre menace car, dirigé par un eurosceptique populiste, elle pourrait pulvériser l’Euro à la moindre secousse.

2) Définir une zone économique homogène

Les efforts exigés de la Grèce doivent amorcer un mouvement d’harmonisation des économies européennes. Il est impossible de partager une monnaie sans définir un mode de fonctionnement commun. La cure grecque doit être prescrite à l’ensemble des pays européens de façon à harmoniser fiscalité, traitement des fonctionnaires, age de départ de retraite… Le débat sur les conditions optimales et pérennes à mettre en place aurait du être tranché avant même la mise en place de la monnaie unique. Il ne peut aujourd'hui plus attendre.

La crise grecque est un rappel à l’ordre au coût limité. Ouvrons les yeux si nous souhaitons pas rejouer jusqu’au point de rupture la fable de « La Cigale (latine) et la Fourmis (germanique) ».

lundi 26 avril 2010

« Let’s talk about SEC, baby… »


Alors que la Securities and Exchange Commission (SEC) comptait regagner du crédit en s’attaquant à Goldman Sachs, voici l’organisme rattrapé par une histoire tout simplement ridicule.
Une inspection interne, menée par le gendarme des marchés américains, révèle que 33 de ses salariés ont consulté des images pornographiques depuis leurs ordinateurs professionnels, pendant leurs heures de travail et pour des visites atteignant jusqu’à 8 heures par jour.
Dans d’autres circonstances, l’affaire aurait amusé car l’information selon laquelle les régulateurs des marchés portaient plus d’intérêt aux positions prises par Sasha Grey qu’à celles prises par Bernard Madoff a quelque chose de caustique.
Cependant, dans un contexte de crise généralisée, cette affaire soulève une interrogation : quelle est le rôle de la hiérarchie dans les structures financières ?
Souvenons-nous, par exemple, du cas Kerviel dont les supérieurs avaient déclaré ne pas être au courant des agissements de leur subordonné… et il y a fort à parier Fabrice Tourre se trouvera aussi isolé…
Deux questions se posent donc :
- Le degré d’autonomie accordé aux cadres bancaires à partir d’un certain niveau n’est-il pas excessif ?
- Si une telle autonomie est nécessaire et efficace, quelle est alors la fonction de leurs supérieurs hiérarchiques ?
La réponse à ces questions est une première étape dans la reprise en main des banques.
Il y a aujourd’hui urgence car le discrédit est tel, à tous les niveaux (banques, régulateurs…), que les particuliers, inquiets, pourraient opter pour placer leur argent… sous l’oreiller.

dimanche 18 avril 2010

Mélanie Laurent, ambassadrice enthousiaste et nécessaire de la « Positive Attitude ».



Tout le monde se souvient avec un sourire de Jean-Pierre Raffarin – alors premier ministre –nous invitant à adopter la « Positive Attitude » alors chantée par l’éphémère Lorie. La société du « Care », nouveau refrain de Martine Aubry, ne semble clairement pas destinée à une adhésion plus massive…
Il est pourtant important de trouver des ressorts pour émerger de l’abîme dans laquelle nous plongent les difficultés auxquelles nous sommes confrontés mais aussi celles qui nous sont quotidiennement rapportées.
Un rapide tour d’horizon de la semaine qui prend fin illustre – malheureusement de façon non caricaturale – l’enfer que semble être notre société.
Une prise d’otage menée par un homme multirécidiviste souhaitant être transféré dans une prison proche du lieu de résidence de sa femme et de son nouveau-né [belle histoire entamée et consommée dans l’huis clos de la prison]. L’annonce de la révision de deux procès dans des affaires où l’ensemble des acteurs sont au moins aussi glauques que les faits jugés. Au-delà de ces cas, on découvre une nouvelle fois qu’il n’existe parfois aucun refuge pour échapper à cette violence. L’affaire des viols collectifs aux Ulis nous à (re-)plongé dans le quotidien inhumain d’une famille délaissée par les pouvoir publics et n’ayant plus d’autres alternatives que la fuite. Encore plus inquiétant – car insidieux – le témoignage, dans Libération, d’un « bon » père de famille condamné pour détention de millions d’images pédo-pornographiques souligne l’omniprésence de l’anormalité.
Dans un tel contexte, l'actualité internationale – pourtant dramatique –(deuil polonais, nuage islandais, irrégularités massives de Goldman Sachs…) a occupé une fonction de spectaculaire échappatoire.
C’est dans cette effroyable série que le Monde Magazine publie aujourd’hui une interview salvatrice de Mélanie Laurent.
Pourquoi « salvatrice » ? Tout simplement car pour la première fois en une semaine apparaissaient des termes que l’on pensait disparu de notre vocabulaire. Les mots « amour », « cohérence », « bien » « beau » sont ici prononcés avec une simplicité et une honnêteté telles qu’ils freinent notre chute dans l’inhumanité.
Loin d’être futile, il est heureux de voir des êtres aussi sains et naturels servir de modèle à une génération qui se développe dans un environnement aussi abîmé.
Merci Mélanie!

mardi 23 février 2010

"France Story"


A quelques jours d’intervalle, deux journalistes viennent de nous livrer les témoignages d’individus plongés dans une précarité abyssale.

Le premier est un article de Léa-Lisa Westerhoff qui a rencontré au Maroc trois jeunes adultes fraîchement expulsés de France ("Je ne comprends pas, ma vie est en France").
Ces témoignages permettent de sentir à quel point le terme "expulsion" est approprié.
Il ne s’agit nullement de "reconduite à la frontière". Le pays dans lequel sont débarqué ces trois jeunes leur est inconnu pour ne pas dire hostile.
Pour Hassan, Salima et Mohamed - tous arrivés en France il y a plus de 5 ans - il n’existe dans ce pays aucune équivalence au niveau des diplômes, pas d’emploi et dans les cas les plus extrêmes ni toit pour les abriter, ni famille pour les accueillir.
Il ne s’agit pas d’un "retour au pays" mais belle et bien d’un "(re)jet vers l’abîme".

Florence Aubenas, dans Le Quai de Ouistream, nous précipite dans le quotidien de salariés précaires.
Ici, les primes de 150 € sont des parachutes dorés, l’absence de télévision est un crève-cœur et l’ambition inavouable est d’atteindre le statu de caissière.
Au-delà de ces anecdotes, ce qui transperce, c’est le courage et la détermination de ces travailleurs précaires : tous semblent prêts à travailler pour des salaires inférieurs au SMIC, tous multiplient les trajets pour quelques heures de travail et tous vivent dans l’effroi de perdre les contrats d’intérim ou les allocations qu’ils peuvent encore obtenir.

La somme de ces visages et de ces histoires démonte de nombreux préjugés trop couramment véhiculés. Ces individus nous invitent à ne pas agir de façon empirique face à des problématiques complexes. Le devoir de nos élus est de chercher à trouver des solutions pour intégrer ces populations. Cette dynamique est essentielle pour la France : en se contentant de stigmatiser et d’observer, nous ressemblons trop à cette salariée d’une agence d’intérim qui, apeurée par sa propre impuissance, supplie Florence Aubenas de ne plus se présenter à son guichet…